Bach, J.S. (1685-1750) Le Clavier bien tempéré. Zhu Xiao-Mei.
Clavier bien tempéré livre 1 et 2.
Zhu Xiao-Mei, piano Steinway D
Enregistré en 2007 en Ferme de Villefavard (2e livre)
Enregistré en 2009 au Temple N.D.Bon Secours, Paris (1er livre)
Mirare. 2013. MIR 235. 4 cds.
Appréciation: Superbe*****
Prélude et fugue no.1 en do majeur (1er livre)
Prélude et fugue no.23 en si majeur (2e livre)
Zhu Xiao-Mei (n.1949) est l’exemple vivant de l’universalité de la musique de Bach. Mais en 1964, la Chine interdisait toute musique occidentale sur son territoire. La jeune prodige, alors confinée dans un camp de rééducation en Mongolie Intérieure, recopiait secrètement le Clavier par peur de représailles. C’est là aux confins du monde, dans une « petite pièce totalement glaciale » que la musicienne trouva dans l’œuvre de Bach… « la capacité de me redonner courage, de me rendre heureuse… »
Ce bonheur, au fil d’un long cheminement personnel et musical, elle nous l’offre dans ce magnifique coffret. Ce Bach du 18e siècle, auquel la pianiste a ajouté tant de répétitions, de travail inlassable autant sur la technique que sur l’âme de ces 96 pièces, elle l’apporte jusqu’à nous « comme l’on le ferait avec une bougie ». Sans éclat, sans spectacle, mais avec une joie indéfinissable. Il suffit de fermer les yeux pour comprendre.
Pourtant de cette première approche auditive, on s’attendait à être étonné, ou frappé. Il n’en est rien. Il y a ce piano tout feutré, sans grande couleur. Ces petites mains qui effleurent les notes. On y découvre un Bach bien délicat. « Il faut prendre son temps. Nous sommes dans un monde où tout va tellement vite, que nous n’avons plus le temps d’écouter, de regarder et d’admirer ».
Cela prend effectivement quelques mesures pour bien apprivoiser son art, car c’est parfois très rapide, mesuré au millimètre près. Et puis, au travers de ce toucher aux milliers de gouttes de pluie, apparaissent le ravissement des images et des couleurs les plus fines. Ces mains semblent tracer d’innombrables calligraphies auquelles l’auditeur lui ajoutent ses propres fantaisies. Les fugues deviennent des chorals où chaque voix s’entrelacent admirablement. Et soudain une phrase s’élève comme un cantus firmus, au-dessus des fidèles… Ce Clavier est celui du dépouillement, mais aussi d’une rigueur exceptionnelle. « Cette musique est celle du bonheur…elle nous tire vers le haut. C’est la musique du Bien, et approcher le Bien rend heureux ». (Zhu Xiao-Mei ) Il suffit de fermer les yeux…
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