Schumann (1810-1856) Les Symphonies. Staatskapelle Dresden. Christian Thielemann.

Symphonies no.1 à 4

Staatskapelle Dresden

Christian Thielemann, direction.

Enregistré à Suntory Hall, Tokyo en 2018.

Sony Classical. 2019. 19075943412. 2cds. 140m.

Appréciation: Sommet du Parnasse******

 

Lebhaft 1er mouvement Symphonie no.3 Rhenish op.97

Scherzo molto vivace Symphonie no.1 Spring op.38

Finale Allegro molto vivace Symphonie no.2 op.61

L’album a été enregistré au Suntory Hall à Tokyo, magnifique salle construite en 1986 et entièrement financée par la compagnie Suntory, géant industriel de liqueurs alcoolisées. Cette salle de 2000 places est réputée pour son acoustique et sa spatialisation en forme de  »terrasses de vignes orientées vers le soleil ». Disons le tout de suite: l’enregistrement de cette coproduction allemande/japonaise est extraordinaire. Pour moi, la seule façon d’écouter cet album nécessite un système audio de haute-fidélité digne de ce nom. Sinon, on rate complètement l’expérience, rien de moins. Pour en reproduire dignement toute la grandeur, autant de la musique de Schumann que de la présence imposante de la Staatskapelle Dresden, il faut avoir les moyens de ses ambitions. La musique classique a besoin des meilleurs médiums technologiques qui soient. Dans ce cas, Écoutez ou n’écoutez rien du tout! Les audiophiles les plus scrupuleux seront ici comblés au-delà des attentes.

L’orchestre est somptueux, en grandeur nature, large et profond. Les cordes, jamais agressives, toutes en rondeurs souples et généreuses, remplissent tout l’espace à elles seules. Les contrebasses, génératrices de basses fréquences irrésistibles, semblent provenir d’un sol très profond, donnant parfois l’illusion que le plancher se dérobe sous nos pieds! L’étagement des instruments se perçoit facilement, les vents, les cuivres, les timbales, chacune des sections bien à sa place. Et bien sûr, on ne manque rien des timbres, des textures, des résonances qui se déplacent dans l’air, et se prolongent perceptiblement dans une réverbération contrôlée et juste. C’est du grand art de la sonorité maîtrisée, made in Japan, si l’on peut dire.

Christian Thielemann (n.1953) est un grand chef de style traditionnel, jadis assistant de Karajan, qui ne lésine pas sur les forces de son orchestre. Tout est superlatif, d’une impression massive, parfois un peu lourde, mais d’une puissance jamais prise en défaut. Tout ce que vous avez souhaité entendre d’un grand ensemble se retrouve ici, dirigé par un maestro à la hauteur de la réputation des anciens chefs que la tradition nous a imposé!

Ce que j’aime particulièrement de son interprétation est le travail sur les tempos qu’il fait sans cesse fluctuer pour bien traduire les impressions de la musique de Schumann. Véritable guide sur un sentier, il ralenti parfois l’allure pour qu’on l’on puisse admirer certains détails qui nous échappaient auparavant. Ce chef conduit sa troupe comme bon lui semble, énergise les phrases ou les suspend brièvement, contrôle la masse orchestrale ou l’assujettie à de délicates sonorités d’une beauté toute simple.

À propos de la deuxième symphonie op. 61, je crois que Thielemann a bien compris cette oeuvre particulière de Schumann. Écrite en 1845 après une grave dépression, Schumann avouera qu’il n’était pas très en forme au moment de la composition, sauf pour les deux derniers mouvements où  »il était un peu plus lui-même ». Cette symphonie est celle du combat désespéré de l’esprit sur la maladie, comme en fait foi quelques passages à vide, ses motifs répétés inlassablement, ou par les plaintes trop lancinantes de l’Adagio espressivo. Thielemann prend bien son temps pour en dévoiler toute la souffrance du compositeur, sans égard pour l’auditeur qui doit se résoudre à être patient pendant ces longues dix minutes! Mais au final, je n’ai jamais entendu une aussi convaincante résolution de la symphonie. La lumière apparaît enfin, et la coda grandiose est un moment de triomphe extraordinaire. Une arrivée au sommet bien méritée, après avoir vécu intensément les épreuves de Schumann. Celui-ci termine son chemin de croix dans une finale pleine d’espoir.

 

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