Quatuors composés entre 1805-1827.
Schuppanzigh-Quartett (instruments d’époque).
Enregistré entre 2004-2016 par la Deutschlandfunk.
CPO. 777014/227/305-2. 3cds. 52m./60m./75m.
Appréciation: Superbe*****
Allegro du Quartet Woo37 (1827)
Larghetto con moto du Quartet Woo48 (1824)
Air russe du Quartet op.70 no.1 (1816)
Finale du Quartet op.126 no.2 (1824)
« Dans le quatuor, l’expression de toute idée musicale se limite à ses éléments les plus strictement nécessaires, les quatre voix, avec lesquelles elle ne peut capter l’attention que par son contenu même… » (Carl Maria von Weber).
Voilà une définition qui résume bien le quatuor à cordes. Une réduction à l’essentiel de la musique. On peut le comparer à quatre personnages discutant ensemble de manière intelligente, tout en s’écoutant les uns les autres. Cette forme d’art complexe, rigide et exigeante, c’est surtout à Haydn que l’on doit d’en avoir fixé les règles de base. Il a voué presque toute sa vie au genre. Beethoven a trimé dur pour créer ses propres quatuors, comme en témoigne les nombreuses esquisses inachevées et les ratures sur les manuscrits originaux. Quant à Mozart, pourtant habitué à travailler très rapidement, il s’est retrouvé souvent bloqué devant la difficulté de la tache. « Ce fut un long et dur labeur » dira t’il des quatuors dédiés à Haydn.
Le quatuor à cordes révèle bien souvent les motivations les plus personnelles du compositeur. En dehors des goûts du public, ces oeuvres sont souvent exécutées dans un espace intime par le compositeur lui-même qui en assume une des parties. La plupart du temps, des amis proches du musicien se joignent à lui. Ce fut le cas de Ferdinand Ries, élève et ami de Beethoven qui le fréquenta pendant quelques années à Vienne. Ries était un excellent violoniste et compositeur. Il fut cependant complètement éclipsé par le géant Beethoven. Ces oeuvres ne furent que peu publiées de son vivant. On dit qu’à la fin de sa vie il demeura amer de cette situation.
Depuis quelques années, la maison de disque CPO s’est consacrée à nous le faire redécouvrir par un nombre appréciable d’enregistrements. La musique de Ries est à la croisée des chemins. Un mélange classique/romantique. Une première impression de ses quatuors nous fait évidemment penser à Haydn et au jeune Beethoven. Mais la richesse et l’inventivité que Ries a apporté à ses quatuors force l’admiration. Très méticuleux et exigeant dans son travail, (il n’a d’ailleurs publié qu’une dizaine de quatuors sur les 26 qu’il a créé), sa musique étonne par sa densité, tissée très serrée, tout en demeurant accessible et harmonieuse. Le cerveau est fortement stimulé, autant que le coeur qui en ressent toutes les passions!
Après plusieurs écoutes, l’auditeur se surprend à découvrir sans cesse de nouveaux éléments à la musique de Ries. Composés entre 1805 et 1827, les quatuors proposés ici par le Schuppanzigh-Quartett sont interprétés sur instruments d’époque avec une précision remarquable. Les instrumentistes ont accompli, à tous égards, une réussite exemplaire et totalement satisfaisante. On espère d’autres volumes du même ensemble, car Ferdinand Ries le mérite amplement.