Archive for the Bruckner Category

Bruckner, Anton (1824-1896) Symphonie no.4 Romantique. Version III 1888. Altomonte Orchestra. Rémy Ballot.

Posted in Bruckner with tags on 30 décembre 2022 by René François Auclair

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Symphonie no.4  »Romantique » en Mib majeur.

Version III de 1888. Édition Benjamin Korstvedt, 2004.

Altomonte Orchester St-Florian. Rémy Ballot, direction.

Enregistré à la Basilique St-Florian, Haute-Autriche, août 2021.

Ingénieur: John Gladney Proffitt.

Gramola. 2022. 99261. 79m.27s.

Appréciation: Sommet du Parnasse******

Ruhig bewegt

La célèbre quatrième symphonie de Bruckner a connu un long cheminement. Conçue en 1874 puis rejetée par le compositeur, elle subit par la suite plusieurs remaniements, jusqu’à sa forme définitive de 1888. Lors de sa genèse, Bruckner en proie au doute et à la dépression, voyait avec  »horreur une composition bourrée d’imitations... »

Le temps et le travail arrangeant les choses, il retourna à sa composition en 1878 et en changea considérablement plusieurs passages, en particulier le Scherzo et le Final. Le chef Hans Richter la dirigea donc pour la première fois à Vienne en 1880. Le succès fut phénoménal. Et puis, fort des réussites des symphonies subséquentes, Bruckner repris le travail une dernière fois, avec quelques modifications et des indications très précises. Cette version III fut utilisée par les grands chefs de l’heure, comme Walter, Fürtwangler et Knappertsbusch pour être ensuite mise de côté. Ce n’est qu’en 1996 que le musicologue Benjamin Korstvedt la ressortit des archives et la réédita en 2004.

Le chef Rémy Ballot reprend cette dernière version pour l’enregistrement live de août 2021 au sein de la grande basilique St-Florian. La version III diffère sensiblement de la deuxième, Bruckner ayant gardé essentiellement tous les passages qui avaient été recomposés. Il en a modifié un peu l’instrumentation, fait quelques coupures, et ajouta des annotations en ce qui a trait à la dynamique. Ainsi, l’indication de tempo du premier mouvement fut changée pour Ruhig bewegt, (de manière calme).

Rémy Ballot a offert à cette symphonie tout le temps voulu pour la magnifier par de longues phrases qui s’épanouissent dans la réverbération de la cathédrale. L’effet est grandiose, supporté par un souffle continu. Sa vision de l’oeuvre demeure celle du respect noble et sacré de la musique de Bruckner. Le choix de tempis lents produisent des climax d’une grandeur indescriptible. L’émotion côtoie souvent l’exaltation. Il faut citer ici la grande coda de la Finale, particulièrement réussie, qui progresse lentement comme sur une échelle de Jacob jusqu’à l’apothéose.

À défaut d’être analytique ou ciselée de contrastes palpitants, cette interprétation est à l’image de la tradition. S’élevant au sein d’une atmosphère mystique, cette Romantique est l’une des plus visionnaires de la discographie.

Bruckner, Anton (1824-1896) Symphonies 3-4-6-7-9. RSO Stuttgart. Roger Norrington.

Posted in Bruckner on 7 novembre 2021 by René François Auclair

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Symphonie no.3 « Wagner Symphonie » 1ère version 1873 (61m.02s)

Symphonie no.4  »Romantique » 1ère version 1874 (60m.33s)

Symphonie no.6 1879 (51m.41s)

Symphonie no.7 1883 (55m.11s)

Symphonie no.9 Version 1894 (51m.59s)

Enregistré  »Live » en 2007-2010 au Liederhall, Beethovensaal, Sttutgart.

SWR Music. 2021. SWR19528CD.

Appréciation: Superbe*****

Allegro moderato 7e Symphonie

On poursuit notre exploration des rééditions en format économique que la SWR a lancé cette année. Après le coffret Beethoven, paru l’an dernier, le label allemand nous a offert coup sur coup en 2021, Mozart, Haydn, Brahms et Bruckner, tous sous la direction de Sir Roger Norrington avec le RSO de Stuttgart. Évidemment à un prix aussi bas (environ $25 le coffret), je me suis procuré toute la série! L’autre raison de l’achat est la curiosité suscitée par le travail du chef britannique, connu pour ses recherches historiques en matière d’interprétation.

Ainsi, il a osé appliqué ses thèses historiquement bien informées à la musique de Bruckner. La discographie abondante de ses 9 symphonies, par les plus grands orchestres de la planète, nous a habitué à des expériences sonores gigantesques. Il en va de soi avec Bruckner, dont la vision mystique et grandiose ne demandent pas mieux que des orchestres bien fournis. Et personne ne viendra contredire cette façon très romantique d’aborder sa musique. Vibratos généreux et appuyés des cordes, soutenus par de larges sections de cuivres et de contrebasses, ces interprétations traditionnelles sont également soumises à des tempi très lents, à limite de la patience des auditeurs! Au sein de cette musique unique, on se retrouve parfois hors du temps, en face de forces cosmiques qui nous dépassent.

Norrington propose un retour aux sources avec Bruckner, comme l’avait fait avant lui les baroqueux. Il prétend, par exemple, que le vibrato n’a été adopté par les orchestres qu’à partir du début 20e siècle. Ainsi, la sonorité des cordes est très incisive et nette. Le chef a par ailleurs opté pour des tempos rapides. Ils sont audacieux, voire déstabilisants. Certains passages s’entendent comme un ensemble de chambre qui met en lumière les interventions solos des instruments. Les mouvements lents prennent une toute autre allure, allégée de leur langueur habituelle. Ces exécutions en format réduit semblent inévitablement ôtées une grande partie de la moelle interne des symphonies. L’indéniable puissance de la musique Bruckner a perdu ici son aura mystique que la tradition nous a imposé. Bruckner entendait t’il ses oeuvres de cette façon? On n’en est pas certain.

Le chef britannique a tout de même réussi à nous interroger, à réévaluer notre manière d’aborder cette musique. Il y a une liberté nouvelle dans cette façon moins religieuse, mais plus humaine de jouer la musique de Bruckner. Il y a une joie inusitée qui s’installe, l’aspect dansant des rythmes et la pureté du chant nous interpellent d’une nouvelle manière. Au final, cette interprétation originale est sûrement la plus moderne qui soit et rejoindra peut-être un nouveau public.

Comparatif: Extrait de l’Allegro moderato 7e Symphonie. Eugen Jochum/Berliner Philharmoniker. 1967.

Bruckner (1824-1896) Latin Motets. Latvian Radio Choir.

Posted in Bruckner with tags on 7 novembre 2020 by René François Auclair


Latvian Radio Choir.

Sigvards Klava, direction. On

Kristine Adamaite, orgue.

Enregistré à Riga Dome Cathedral, Lettonie, en mars 2020.

Ondine. 2020. ODE 1362-2. 58m.48s.

 

 

Appréciation: Sommet du Parnasse******

Os Justi (1879)

Ave Maria (1861)

Vexilla Regis (1892)

Les motets en latin de Bruckner sont des pièces brèves, d’une conception simple que l’on écoute avec sérénité. On y reconnait quelques motifs se retrouvant dans ses grandes architectures symphoniques. Bruckner a composé ces oeuvres pour les offices religieux de son temps. À la base, il leur a donné un aspect traditionnel. Mais en les harmonisant délicatement de couleurs romantiques, ces motets évitent la sévérité archaïque des anciens modes. Ils semblent ainsi plus modernes, et d’une certaine façon, on peut mieux s’identifier à eux.

Encore une fois, le Latvian Radio Choir s’exécute avec la perfection qu’on leur reconnait. L’ensemble de Riga en Lettonie se distingue par la légèreté des lignes mélodiques, la transparence diaphane, la respiration musicale parfaitement maîtrisée. L’acoustique formidablement vaste de l’endroit leur confère une aura mystique d’une beauté inégalée. Les notes particulièrement aiguës des sopranos sont d’un raffinement rare, d’une expression gracieuse de haute envolée. C’est la liberté du chant humain à l’état pur. La voix humaine, transcendée par cet art vocal sublime, a sur l’esprit un inexplicable bienfait. La lumière de la musique irradie ce disque parfait.

 

Bruckner, Anton (1824-1896) Symphonie II Version originale de 1872.

Posted in Bruckner with tags on 10 mars 2020 by René François Auclair

Symphonie no.2 en do mineur, version 1872.

Édition William Carragan 2005.

Altomonte Orchester St-Florian.

Rémy Ballot, direction.

Enregistré en public à Stiftsbasikika St-Florian, Autriche en 2019.

 

Gramola Records. 2019. 99211. 2cds. 84m.5s.

Appréciation: Sommet du Parnasse******

Extrait du Scherzo

Extrait de l’Adagio

Extrait du Finale 

C’est dans les archives de la Basilique St-Florian que le musicologue William Carragan découvrit, en 1990, les manuscrits originaux de 1872 de la deuxième symphonie. Jugée à l’époque beaucoup trop longue, il fut demandé à Bruckner de la réduire substantiellement pour éviter « d’épuiser le public ». La version originale fut donc mise de côté pendant plus d’un siècle. Carragan l’a reconstruite d’un bout à l’autre en respectant le plan initial du maître de St-Florian. Ainsi, le Scherzo retrouve sa place d’origine, après le premier mouvement, redonnant une structure plus appropriée à l’oeuvre. Le magnifique Adagio qui suit prend alors tout son sens. Il fait figure d’une longue pause méditative entre deux sections colossales, un repos complet avant de reprendre le sentier de cette grande odyssée humaine et spirituelle. Quant au Finale, il contient des passages magiques qu’on semble découvrir pour la première fois. À lui seul, ce mouvement est une véritable symphonie.

C’est en comparant le minutage de la première symphonie (1866) que l’on se rend compte à quel point Bruckner voulait produire une deuxième oeuvre beaucoup plus ambitieuse que l’on aurait cru. L’interprétation qu’en donne Rémy Ballot, d’un souffle continu et d’une grandiose lenteur de 84 minutes, est l’une des plus longues de l’histoire de la discographie. Si l’on veut bien tout laisser à l’entrée de cette Basilique, on se retrouvera hors du temps. L’esprit naviguera entre les thèmes immenses en forme de cycle perpétuel, en mouvements bâtis par de larges tensions qui se développent et se libèrent. C’est l’effet Bruckner, parfaitement réussit par l’Orchestre Altomonte.

Au sein d’une vaste acoustique bénie des dieux, le chef prend bien son temps pour faire planer l’ensemble. L’exécution est admirable, comme un hommage émouvant au grand Sergiu Celibidache, dont Rémy Ballot fut le disciple. Un moment mémorable où la deuxième symphonie reprend sa place définitive au côté des plus grandes.